Et si l’on vous prêtez 5 millions d’euros cash? Qu’en feriez vous?
Je ne vous parle pas d’aller tout claquer au casino ou au concessionnaire du coin!
Je parle d’une stratégie de lynx pour faire fructifier le capital avant de le rembourser.
Et bien, c’est la question que m’a posée Anthony récemment dans les commentaires:
Bonsoir Jean,
J’ai la possibilité d un prêt à taux zéro sur une durée indéfinie prêt familial (5millions€)
J’aimerais acheter un parc immobilier à mettre en location.
Puis par effet de levier bancaire, acheter un bien y faire des travaux et le revendre.
Je commence petit pour rêver faire 3-5 transactions par an par la suite.
Dans les 2 ans, je dois commencer à rembourser ma dette à raison de 200,000€ par an.
Sachant que j’ai une grosse dette déductible fiscalement et 4 parts pour les impôts (3 enfants)
Je ne sais pas du tout quels statuts entre indépendant, marchand de biens, SARL etc…
Vos lumières seraient incroyables
Bien à vous
Anthony
Comme toujours, ce type de réponse dépend de la situation de chacun, de ses compétences, de son expérience, et de son aversion au risque.
Mais on peut trouver quelques pistes d’action:
Clarifier la dette
Tout d’abord, même si l’entente familiale est cordiale, je ferais le nécessaire administrativement pour que les éléments de la dette soit clarifiés par écrit. Durée, taux, etc…
S’il y avait un changement d’ambiance, un décès prématuré, bref toute mauvaise nouvelle inattendue, ce pourrait être en plus une catastrophe financière pour vous.
On commence donc par bien faire les choses administrativement.
Se structurer – un peu d’administratif bon sang!
Ensuite, il me semble que la structuration en société est impérative pour des raisons essentiellement fiscales mais aussi pour clarifier votre comptabilité.
Je m’explique. Que vous fassiez de la location ou de l’achat-revente, vous allez générer des revenus. Comme les montants sont colossaux (si, si, 5 millions c’est beaucoup pour le français moyen !), vous allez être immédiatement taxé dans les tranches marginales d’imposition les plus hautes (même avec trois enfants !)
En créant une structure adaptée, vous passez à l’impôt sur les sociétés (et non plus l’impôt sur le revenu). L’IS sera donc plafonné (en ce moment à 28%).
Cela permet de travailler plus sereinement. Vous ne sortirez de l’argent de la structure que lorsque vous en aurez suffisamment, en utilisant les dividendes. Là encore, « flat tax » oblige (cf moteur de recherche pour plus d’infos), votre imposition sera plafonnée. Attention cependant à garder un paiement en salaire au minimum pour éviter le redressement car vous n’avez que des revenus du capital (je ne développe pas là encore, désolé, sinon ma réponse ferait un livre).
En plus, tout cela permet de déduire vos charges sur la structure, ce qui est fondamental.
A ma connaissance, le statut de SAS me semble parfait. C’est ce que nous utilisons. Encore une fois, je ne suis ni le juriste, ni l’expert-comptable.
Avec ce montant là entre les mains, cela vaut le coup de faire un petit détour chez quelques professionnels pour s’assurer de leurs conseils (attention, les conseilleurs ne sont pas les payeurs et tâchez d’en trouver un bon vu le capital de départ).
Pour finir avec l’administratif, reste à savoir s’il suffira de créer une seule et même structure pour la location et l’achat-revente.
Vous pouvez aussi créer une foncière (type SCI par exemple, à creuser..) et une SAS pour l’achat-revente. Les deux peuvent être connectées par une holding (une société qui possède les deux autres sociétés) pour faciliter les mouvements de capital entre les deux sociétés sans trop d’imposition. L’argent qui sort d’une société vers une autre ne passe pas par votre imposition personnelle.
Ce montage est celui que j’utilise personnellement pour éviter les imbroglios entre court terme et long terme.
Utiliser l’effet levier
Pour la partie stratégie, il y a vraiment plusieurs options possibles.
Elles consistent toutes à faire un arbitrage quelque part entre 100% d’achat-revente et 100% de locatif.
Dans tous les cas, vous devez effectivement profiter de l’effet levier pour vous faciliter la tâche. Pour les débutants, l’effet levier, c’est le fait d’emprunter au banquier. Par exemple, Anthony apporte 20% du capital pour des achats locatifs. Le banquier va donc lui prêter 20 millions d’euros (pour ce type de montant, l’apport sera très certainement supérieur contenu de l’origine des fonds). Il pourra donc générer un rendement annuel sur 25 millions plutôt que sur 5.
Répartition du capital
Enfin il convient de déterminer quelle part du capital vous utilisez entre le locatif et l’achat-revente.
Je m’attacherais à sécuriser au maximum ma situation plutôt qu’à prendre des risques importants. Vous avez déjà beaucoup d’argent, vous n’aurez pas besoin d’avoir l’agressivité stratégique que nous avons dû mettre en place avec mon associé.
La réponse précise dépend de l’effet levier que va vous permettre le banquier sur le locatif et sur l’achat-revente.
En fonction, vous pourriez commencer par générer suffisamment en locatif pour rembourser la dette annuelle. Puis vous essayez de faire quelques achats-reventes avec le reliquat pour optimiser la rentabilité et le remboursement.
Là encore, cela dépend tellement de votre expérience et votre aversion au risque!
Il convient de faire des calculs en faisant varier les données de chaque situation ; effet levier et rentabilité du locatif et de l’achat-revente.
Et finalement pourquoi l’immobilier?
De toute évidence, l’immobilier est un très bon choix pour profiter de cette opportunité.
Mais compte tenu des montants, je pencherais aussi pour un équilibrage sur un « portefeuille long terme » en gestion passive avec des outils financiers.
J’utilise également ce type de mécanisme pour l’excédent de cash.
Tout est une question d’équilibrage par rapport à vos compétences et de gestion de la dette. Certains portefeuilles longs termes rapportent près de 10% ; disons 8 pour ne pas se fâcher. Sur 5 millions, cela veut dire 400.000 euros de revenus annuel. Largement de quoi rembourser la dette.
L’intérêt de l’immobilier ne réside que dans l’effet levier. On ne peut pas en avoir (pour le commun des mortels) sur du financier en arbitrage libre. Mais l’immobilier est bien plus prenant que le financier pur.
Encore une fois, et comme dans tous les compartiments de la vie, il s’agit de trouver le bon équilibre! Dites-moi en commentaire quel conseil vous donneriez à Anthony si vous aviez 5 millions d’euros de prêt.